A fond l'électrique !
Echappement N°384, août 1999


Sylvain Allegre exploite depuis deux ans à Clermont-Ferrand, un karting indoor dont la particularité est d'utiliser des karts animés par l'énergie électrique. Aujourd'hui, son objectif est de développer la fabrication de ces engins qui représentent, selon lui, la seule solution viable à l'avenir pour les pistes indoor.


Texte de PATRICK DAMARY

Comme nous l'explique Sylvain, la création d'une piste de karting indoor est l'aboutissement de deux aspects de son vécu: "le passionnel, puisque je pratiquais les sports mécaniques sous différentes formes depuis dix ans, et le professionnel. Dans mon métier de "responsable sous-traitant", j'avais en charge de lancer des fabrications chez des gens..."
Trouvant que le kart indoor avait un bel avenir et manquait parfois d'un peu de sérieux à ses yeux, Sylvain eut l'idée d'appliquer la technique Décathlon à un autre domaine, "à savoir, un bâtiment propre, acceuillant, et un concept nouveau".
Ce concept novateur est le choix d'une motorisation électrique, Sylvain est persuadé que les moteurs thermiques seront bannis de l'indoor dans les cinq années avenir. Il ne considère pas cette opinion comme une vue de l'esprit mais comme un pari sur l'avenir, argumenté du fait que dans l'industrie des chariots élévateurs, par exemple, sont aujourd'hui électriques et, comme le souligne notre interlocuteur, "ceux qui viendront à l'électrique dans cinq ans ne seront plus des précurseurs. Bien sûr, ils ne rencontreront plus les problèmes de mise au point qui nous ont affectés au début...".

Sylvain Allegre est persuadé que les karts thermiques seront bannis de l'indoor dans les cinq années à venir
En effet, le maître des lieux noue avoue avoir "grillé" pas mal de matériel et, sans l'aide de son ingénieur électronicien de père, la partie n'était pas gagnée. "Au niveau des temps de charge des batteries, par exemple, nous étions bien en dessus de ce qui est acceptable en terme de rentabilité. C'est grâce à la double compétence mécanique-électricité que nous avons pu avancer si vite. Nous avons connu de gros déboires en terme d'exploitation au début, ce qui me permet de dire que les responsables de pistes qui vont se lancer dans cette voie sans connaissances auront de grosses difficultés, d'où la nécessité de proposer des engins spécifiques et spécialisés."
Ainsi Speedomax s'apprête à passer à la phase suivante de son programme et vient de sortir un prototype de kart électrique. La mise au point est quasiment achevée et une pré-série va être lancée dans le grans bain de l'exploitation sur la piste de Clermont-Ferrand.
"Pour moi, l'objectif est clair depuis le début, conclue Sylvain Allegre, Il nous fallait découvrir un domaine mal connu: le kart électrique, acquérir toutes les compétences en exploitant une piste et ensuite développer du matériel électrique que nous allions vendre aux autres pistes, les libérant ainsi de tous les soucis inhérents à la découverte de ce type d'activité." Speedomax souhaite ainsi commercialiser un produit totalement éprouvé et proposer dans le package sa propre expérience liée à l'exploitation de cet engin. Là encore, l'esprit cartésien de l'ingénieur en mécanique s'est associé à la motivation du passionné.

Silence, on tourne !
Les avantages du kart électrique se situent selon Sylvain Allegre à quatre niveaux: "C'est d'abord un produit "écologiquement correct" de part l'absence de gaz d'échappement et de nuisances sonores. Ensuite il est plus performant qu'un kart thermique, ce qui est important dans un contexte concurrentiel avec d'autres pistes sur une même zone géographique. Sur le plan commercial, les sociétés sont sensibles aux aspects liés à la propreté, l'écologie, mais aussi la nouveauté et l'aspect Hi-Tech du matériel. Enfin le dernier avantage est la qualité des relations que l'on a avec les administrations et autres pouvoirs publics puisque l'on joue totalement le jeu. La pluspart des villes revendiquent aujourd'hui une politique de respect de l'environnement et même des actions dans ce sens. Nous sommes tout à fait dans cette mouvance et lorsque l'on souhaite monter des opérations, les portes s'ouvrent facilement." Mais que répondre aux gens qui déplorent l'abscence d'ambiance sonore? "C'est une réaction normale de la part de gens qui n'ont jamais essayé nos karts. Ensuite leur opinion évolue..."

Le propulseur développe une puissance réglable de 8 à 16 ch. Dans les caissons: les batteries étanches au plomb.
La pédale de frein est reliée à un coupe-circuit.
La partie arrière avec le boîtier électronique qui permet au "stand" de recevoir des informations depuis la piste. On peut notamment limiter ou couper la puissance si nécessaire.

Biographie
Sylvain Allegre est né le 7 Juin 1969 à Clermont-Ferrand. Titulaire d'un Bac F1 à la "mission Michelin", il obtient quelques années plus tard un diplôme d'ingénieur en mécanique à l'ENI de Metz. Il travaille chez Decathlon pendant 5 ans en qualité de responsable de sous-traitance "secteur métal" à Lille puis à Lyon où il s'occupe plus particulièrement des vélos. Passionné de sports mécaniques depuis toujours, il découvre le karting sur le piste de la Française de Mécanique à Douvrin, après avoir disputé le championnat de France de Solex de 87 à 82 sur un prototype élaboré par ses soins. Avec son épouse, il crée Speedomax en mai 97.

Au volant
Mathieu Zangarelli: "les réactions d'un kart classique..."
La première fois que l'on conduit un kart à propulsion électrique, la grande surprise est bien entendu l'abscence de bruit.
On n'ose pas enfoncer la pédale de droite croyant le propulseur éteint... En fait, il ne faut pas hésiter et le démarrage s'effectue dans un silence étonnant... mais avec une poussée bien réelle. On se rend tout de suite compte que les accélérations sont fulgurantes pour un kart de loisir. Ensuite, au fil des tours, on retrouve les sensations du kart classique.
Mathieu Zangarelli, l'actuel leader du championnat de France de Formule Renault, nous a accompagnés durant ces essais et nous livre un avis éclairé sur la partie pilotage. "On a de bonnes sensations. Le proto manque un peu de braquage: c'est normal. Le moteur est puissant mais le chassis l'encaisse bien. Il réagit comme un kart classique. En fait, un châssis tubulaire, quatres roues et un moteur, c'est un kart et ce n'est pas en mettant un moteur électrique à la place d'un thermique que l'on va changer ça. L'abscence d'ambiance sonore choque au début mais comme les sensations sont là, on s'habitue vite. Je pense que c'est plus dans l'ambiance générale, notamment pour les personnes qui regardent, que le bruit manque. Mais ces gens là se rendent compte que l'endroit est super propre: c'est vraiment important quand tu veux faire une opération de relations publiques avec des partenaires..."

Echappement N°384, août 1999