Sylvain Allegre exploite depuis deux ans à Clermont-Ferrand, un karting indoor dont la particularité est d'utiliser des karts animés par l'énergie électrique. Aujourd'hui, son objectif est de développer la fabrication de ces engins qui représentent, selon lui, la seule solution viable à l'avenir pour les pistes indoor.
Texte de PATRICK DAMARY
Comme nous l'explique Sylvain, la création d'une piste de karting indoor est
l'aboutissement de deux aspects de son vécu: "le passionnel, puisque je pratiquais
les sports mécaniques sous différentes formes depuis dix ans, et le professionnel.
Dans mon métier de "responsable sous-traitant", j'avais en charge de lancer
des fabrications chez des gens..."
Trouvant que le kart indoor avait un bel avenir et manquait parfois d'un peu
de sérieux à ses yeux, Sylvain eut l'idée d'appliquer la technique Décathlon
à un autre domaine, "à savoir, un bâtiment propre, acceuillant, et un concept
nouveau".
Ce concept novateur est le choix d'une motorisation électrique, Sylvain est
persuadé que les moteurs thermiques seront bannis de l'indoor dans les cinq
années avenir. Il ne considère pas cette opinion comme une vue de l'esprit mais
comme un pari sur l'avenir, argumenté du fait que dans l'industrie des chariots
élévateurs, par exemple, sont aujourd'hui électriques et, comme le souligne
notre interlocuteur, "ceux qui viendront à l'électrique dans cinq ans ne seront
plus des précurseurs. Bien sûr, ils ne rencontreront plus les problèmes de mise
au point qui nous ont affectés au début...".
Sylvain Allegre est persuadé que les karts thermiques seront bannis de l'indoor
dans les cinq années à venir
En effet, le maître des lieux noue avoue avoir "grillé" pas mal de matériel
et, sans l'aide de son ingénieur électronicien de père, la partie n'était pas
gagnée. "Au niveau des temps de charge des batteries, par exemple, nous étions
bien en dessus de ce qui est acceptable en terme de rentabilité. C'est grâce
à la double compétence mécanique-électricité que nous avons pu avancer si vite.
Nous avons connu de gros déboires en terme d'exploitation au début, ce qui me
permet de dire que les responsables de pistes qui vont se lancer dans cette
voie sans connaissances auront de grosses difficultés, d'où la nécessité de
proposer des engins spécifiques et spécialisés."
Ainsi Speedomax s'apprête à passer à la phase suivante de son programme et vient
de sortir un prototype de kart électrique. La mise au point est quasiment achevée
et une pré-série va être lancée dans le grans bain de l'exploitation sur la
piste de Clermont-Ferrand.
"Pour moi, l'objectif est clair depuis le début, conclue Sylvain Allegre,
Il nous fallait découvrir un domaine mal connu: le kart électrique, acquérir
toutes les compétences en exploitant une piste et ensuite développer du matériel
électrique que nous allions vendre aux autres pistes, les libérant ainsi de
tous les soucis inhérents à la découverte de ce type d'activité." Speedomax
souhaite ainsi commercialiser un produit totalement éprouvé et proposer dans
le package sa propre expérience liée à l'exploitation de cet engin. Là
encore, l'esprit cartésien de l'ingénieur en mécanique s'est associé à la motivation
du passionné.
Silence, on tourne !
Les avantages du kart électrique se situent selon Sylvain Allegre à quatre niveaux:
"C'est d'abord un produit "écologiquement correct" de part l'absence de gaz
d'échappement et de nuisances sonores. Ensuite il est plus performant qu'un
kart thermique, ce qui est important dans un contexte concurrentiel avec d'autres
pistes sur une même zone géographique. Sur le plan commercial, les sociétés
sont sensibles aux aspects liés à la propreté, l'écologie, mais aussi la nouveauté
et l'aspect Hi-Tech du matériel. Enfin le dernier avantage est la qualité des
relations que l'on a avec les administrations et autres pouvoirs publics puisque
l'on joue totalement le jeu. La pluspart des villes revendiquent aujourd'hui
une politique de respect de l'environnement et même des actions dans ce sens.
Nous sommes tout à fait dans cette mouvance et lorsque l'on souhaite monter
des opérations, les portes s'ouvrent facilement." Mais que répondre aux
gens qui déplorent l'abscence d'ambiance sonore? "C'est une réaction normale
de la part de gens qui n'ont jamais essayé nos karts. Ensuite leur opinion évolue..."
Le propulseur développe une puissance réglable de 8 à 16 ch. Dans les
caissons: les batteries étanches au plomb.
La pédale de frein est reliée à un coupe-circuit.
La partie arrière avec le boîtier électronique qui permet au "stand"
de recevoir des informations depuis la piste. On peut notamment limiter ou couper
la puissance si nécessaire.
Biographie
Sylvain Allegre est né le 7 Juin 1969 à Clermont-Ferrand. Titulaire d'un Bac
F1 à la "mission Michelin", il obtient quelques années plus tard un diplôme
d'ingénieur en mécanique à l'ENI de Metz. Il travaille chez Decathlon pendant
5 ans en qualité de responsable de sous-traitance "secteur métal" à Lille puis
à Lyon où il s'occupe plus particulièrement des vélos. Passionné de sports mécaniques
depuis toujours, il découvre le karting sur le piste de la Française de Mécanique
à Douvrin, après avoir disputé le championnat de France de Solex de 87 à 82
sur un prototype élaboré par ses soins. Avec son épouse, il crée Speedomax en
mai 97.
Au volant
Mathieu Zangarelli: "les réactions d'un kart classique..."
La première fois que l'on conduit un kart à propulsion électrique, la grande
surprise est bien entendu l'abscence de bruit.
On n'ose pas enfoncer la pédale de droite croyant le propulseur éteint... En
fait, il ne faut pas hésiter et le démarrage s'effectue dans un silence étonnant...
mais avec une poussée bien réelle. On se rend tout de suite compte que les accélérations
sont fulgurantes pour un kart de loisir. Ensuite, au fil des tours, on retrouve
les sensations du kart classique.
Mathieu Zangarelli, l'actuel leader du championnat de France de Formule Renault,
nous a accompagnés durant ces essais et nous livre un avis éclairé sur la partie
pilotage. "On a de bonnes sensations. Le proto manque un peu de braquage:
c'est normal. Le moteur est puissant mais le chassis l'encaisse bien. Il réagit
comme un kart classique. En fait, un châssis tubulaire, quatres roues et un
moteur, c'est un kart et ce n'est pas en mettant un moteur électrique à la place
d'un thermique que l'on va changer ça. L'abscence d'ambiance sonore choque au
début mais comme les sensations sont là, on s'habitue vite. Je pense que c'est
plus dans l'ambiance générale, notamment pour les personnes qui regardent, que
le bruit manque. Mais ces gens là se rendent compte que l'endroit est super
propre: c'est vraiment important quand tu veux faire une opération de relations
publiques avec des partenaires..."
Echappement N°384, août 1999